Un Psy et Coach à Nantes et Paris
Frédéric LE MOULLEC
Un Psy et Coach à Nantes et Paris
Frédéric LE MOULLEC
Dire
Si l’on peut tout se dire, on ne doit sûrement pas tout se dire ! À quoi bon ajouter l’obligation à ce qui est déjà possible ? Car quand on peut expirer (tout se dire), il faut surtout pouvoir inspirer (ne pas tout se dire) pour continuer à respirer, et non pas se forcer à expirer davantage et risquer ainsi l’asphyxie (psychique). En ce sens, et dans les deux sens, “tout se dire” et “ne pas tout se dire” tous les deux ensemble, constituent des possibilités qui répondent parfaitement au fondement même de la psyché ou de l’âme humaines, elles qui trouvent leur origine, pour la première dans le grec ancien, pour la seconde dans le latin, mais qui signifient toutes deux souffle. S’empêcher l’un comme l’autre (“tout se dire” ou “ne pas tout se dire”) ou s’obliger à l’un au détriment de l’autre est donc le plus sûr moyen de contrarier le fonctionnement de son psychisme et se préparer à une souffrance morale qui en est le signe conjoint, le symptôme. Il n’en faut donc pas tellement plus pour expliquer la persistance du mensonge chez l’être humain malgré sa condamnation morale récurrente, peu en phase donc avec le fonctionnement de la psyché ou l’âme humaines (la biologie n’a rien à faire de la morale !), que le mensonge soit de bonne ou de mauvaise foi. Qui n’a jamais eu besoin d’en user ? Mettre quelqu’un dans l’obligation de dire, et c’est le plus sûr moyen en effet de le tenter et l’inciter à s’échapper par le non-dit, le simple mensonge ou, pire, le mensonge de mauvaise foi. C’est une question d’inspiration presque vitale pour le menteur, tout au moins sur le plan psychique. Cela permet de se rappeler que le mot mensonge vient du mot latin mens, qui signifie esprit, imagination. Et que ferions-nous sans cette capacité d’imagination ? Ainsi le mensonge est une imagination d’un genre particulier, qui cherche à soustraire une personne à l’empêchement ou, pire donc sans doute, à l’obligation de dire (à ce propos, Roland Barthes parlait de fascisme). Autrement dit, si vous ne voulez pas qu’on vous mente, et même si le mensonge en lui-même ne dépend pas de vous, soyez donc prêts à tout entendre, c’est à dire donnez la possibilité à votre interlocuteur de tout vous dire sans pour autant l’y obliger, et ne perdez jamais une occasion de lui prouver qu’il a bien raison de vous faire confiance ! Mais on peut tout aussi bien souffrir de mentir soi-même, et c’est peut-être là une bonne occasion de mieux se connaître. Quels droits nous refusons-nous ou à quoi nous obligeons-nous alors ? Et surtout à quelles fins ? Il y a de ces mensonges qui disent la vérité. Encore faut-il les interroger, sans arrière-pensées.
Photo (© Isabelle Kerloeguen) : mur peint, à Paris, près de l’église Saint-Merri, pas loin de Beaubourg.
mercredi 29 mai 2013