Un Psy et Coach à Nantes et Paris
Frédéric LE MOULLEC
Un Psy et Coach à Nantes et Paris
Frédéric LE MOULLEC
Volonté
Elle a beaucoup fait disserter les philosophes, avant de passer de mode. Elle a trop peu intéressé les psys de tout poil. Peut-être parce que les philosophes l’avait kidnappée. Peut-être parce que trop étiquetée du sceau de la raison pure. Il n’en demeure pas moins que la volonté est une réalité existentielle dont les ressorts neuro psychologiques sont présents en chaque être humain. C’est pourquoi elle ne se crée pas, mais se favorise ou se libère. Ce n’est pas parce qu’une chose n’apparaît pas (toujours) qu’elle n’a pas de réalité.
Si elle est si difficile à exprimer quand on en a réellement besoin, c’est sans doute parce qu’elle relève plutôt de notre seconde nature, humaine, que de notre première nature, animale. Et même si ces deux natures interagissent ensemble. Là est bien le problème justement, dans cette interaction toujours délicate et parfois contradictoire, pour le moins ambiguë.
On peut vouloir sans pouvoir. On peut tout aussi bien pouvoir sans vouloir. Dans l’un comme dans l’autre cas, il y a défaut de volonté. Dans le premier cas, cela peut conduire à la compulsivité, et c’est la volonté extrême de responsabilité qui s’exprime tout à coup malgré soi, qui se déverse à force d’accumulation en un pouvoir d’action irrationnel et démesuré ; dans le deuxième cas, à l’impulsivité, et c’est la volonté extrême d’individualité qui s’exprime tout à coup là aussi malgré soi, sans plus aucun frein. Mais il n’y a de volonté vraie que lorsque ces deux volontés sont au rendez-vous, celle de responsabilité et celle d’individualité, dans un équilibre toujours instable et menacé, à recommencer. La volonté vraie est l’individualité responsable. Elle émane du territoire préfrontal du cerveau. Un troisième cas existe bel et bien lui aussi : ni on ne veut, ni on ne peut, et c’est la dépression. Mais même dans ce troisième cas, la volonté est bien là qui attend, enfouie sous les décombres qu’il conviendra de dégager un à un.
Mais que serait la volonté sans nos désirs ? Et vice versa d’ailleurs, nos désirs sans notre volonté ?
Nos désirs pourraient s’apparenter aux sources de la rivière qui fait notre vie, dont notre volonté serait le lit. Nos désirs émanent plus sûrement de notre première nature, indéfectible, « parce que c’était lui, parce que c’était moi » comme le disait si bien Montaigne à propos des raisons de son amitié avec La Boétie, donc pas si volontaires que cela au départ. Les désirs ne se raisonnent pas, ils se prennent en compte et s’accompagnent. Il est plus répandu que notre volonté s’oppose à nos désirs : notre culture occidentale a tellement valorisé le rationalisme. Elle a horreur du sans pourquoi, du futile, du doute, de l’irrationnel, de l’imprécis, du gratuit... Les symptômes liés à cette opposition sont étonnants voire spectaculaires parfois par leur force déployée : TOCS, boulimie, crises de panique, phobies de tous genres, burn-out, entre autres. Autant de symptômes qui traduisent des désirs bafoués par un excès de responsabilité ou un défaut d’individualité.
À l’inverse, les freins ou blocages de notre volonté, s’ils sont diversifiés, toujours ils agissent sur le découplage de nos capacités de responsabilité et d’individualité. Il convient alors de rétablir cette relation, comme il pourra s’agir de réconcilier ou d’unir désirs et volonté, émotions et raisons, de manière juste et authentique. Et si, dans le fond, la volonté était une histoire d’amour ?
Photo : un matin de lune à la station de tramway Commerce, à Nantes
jeudi 6 novembre 2014