Un Psy et Coach à Nantes
Frédéric LE MOULLEC
Un Psy et Coach à Nantes
Frédéric LE MOULLEC
Symptômes
Un symptôme nous raconte une histoire, une partie de notre histoire, pourquoi vouloir s’en séparer ? Encore que le mot “séparer” signifie littéralement “faire naître à soi”. Alors le symptôme, oui, peut nous permettre de faire naître à soi quelque chose que nous ignorions jusque-là sur nous-même ou que nous ne voulions, pouvions pas voir ou que nous préférions si peu lucidement mettre sous l’éteignoir. Et, oui encore, le symptôme alors disparaîtra, dès que nous lèverons le voile de ce quelque chose et que nous lui ferons place ; le symptôme n’aura plus lieu d’être.
Car le symptôme, c’est “ce qui survient avec”, mais avec QUOI justement ? Quel est ce QUOI que nous négligeons plus ou moins — plus souvent moins — consciemment, et que le symptôme trahit, révèle, rappelle ? Chassez le symptôme, et il revient au galop, le même, plus fort, ou autre, différent, inattendu. Le symptôme est naturel, 100% bio. « Rien de stable ne se saisit », et un symptôme c’est la vie qui se manifeste, se défend, ne s’en laisse pas compter, comme on va chercher l’air quand on en manque, quand nous mourons un peu quelque part en nous, et tant que nous mourons un peu quelque part en nous, tant qu’une part en nous reste figée et nous empêche de nous adapter : pas de vie sans mobilité, sans adaptation. Le symptôme n’est pas stable — donc il est insaisissable, non contrôlable, non maîtrisable — car nous le sommes trop ; il n’est pas singulier, il est particulier et pluriel, puisqu’il le faut ; il nous dépasse, et c’est tant mieux : il nous permet de vivre encore. Entendons-le.
Nous ne souffrons pas de nos symptômes, nous souffrons du regard que nous posons dessus, des conséquences de son interprétation injuste, partiale, non lucide, sourde, et surtout, de ce qui se meurt en nous que le symptôme tente de réanimer comme il peut, comme on réanime un noyé.
Une personne vient me consulter pour l’aider à faire un choix de vie capital pour elle, dans lequel elle s’empêtre depuis plusieurs années. Elle me dit qu’elle n’a jamais su faire de choix, c’est encourageant. Il y a quelques années, elle a fait un burn-out. C’est une personne très — trop — responsable ; elle rationalise beaucoup. Cela, bien sûr, lui confère des qualités certaines ou plutôt elle a usé et abusé de ces qualités trop certaines qu’elle porte en elle depuis toujours, elle en a même fait un métier à travers lequel elle est appréciée : pour quoi faire ou pour ne pas faire quoi ? Son burn-out et, bien avant cela, son incapacité à faire des choix, même futiles, l’avaient mise sur la voie, avaient tenté d’attirer son attention, mais elle ne les avait pas pris au sérieux ou elle les avait pris comme des choses haïssables, à bannir, à circonscrire, sans que rien pourtant ne change dans sa vie : toujours cet équilibre inconfortable, ces tensions intérieures. Après une quarantaine de minutes d’échanges, dans le fil continu de notre conversation je lui demande de prendre le temps de visualiser le choix (capital) qu’elle s’oblige à faire actuellement et de se connecter à ce qu’elle ressent profondément. Assez vite elle me dit : « j’ai envie de me connecter à la terre ». Elle vient de découvrir, mieux, de sentir et de vivre trois choses en une : le choix qu’elle s’obligeait (l’obligation est toujours suspecte) à faire n’est pas capital pour elle, son engagement est ailleurs et plus essentiel ; elle néglige trop ses ressentis ; un choix ne se fait pas seulement en rationalisant, en objectivant, mais également et peut-être surtout en ressentant, en subjectivant.
Une porte s’ouvre, les symptômes en étaient les clés.
Photo : œuvre vue au MoMa de New York
mardi 17 mars 2015